Livre

A travers... La Paléontologie

L'Extraordinaire aventure de GILKY




Je crois que, malgré leur petitesse, leur pérennité fait d’eux les véritables rois de la création terrestre. Trop de force a perdu les monstres, trop d’intelligence a conduit les Hommes à leur perte, il faut en tout un juste-milieu… »


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Pendant qu’elle soliloquait ainsi, Gilky s’éloignait déjà de la Terre. Elle se retourna et poussa une exclamation de surprise en voyant la Lune tout près de la Terre.

Elle n’avait jamais accordé beaucoup d’attention à ce satellite. Elle le jugeait peu intéressant. Et voilà qu’il se rapprochait, comme attiré par la planète autour de laquelle il avait fait tant et tant de tours.
C’est que les marées soulevées par la Lune avaient ralenti, par le frottement de deux bourrelets qu’elles constituaient, la rotation de la Terre. Depuis bien longtemps déjà, ce ralentissement s’était produit, mais Gilky, trop occupée à regarder les habitants terrestres, n’y avait pas pris garde.

La Terre avait ralenti sa rotation jusqu’à ne plus faire qu’un tour sur elle-même en 55 des jours tels que les connaissaient les Hommes. Les jours duraient alors 22 jours et demi, ainsi que les nuits. Dans ces conditions, la Terre tournait toujours la même face à son satellite et ils semblaient rivés l’un à l’autre et ne plus former qu’un seul système continuant à tourner autour de leur maître commun : le Soleil.

Pendant que Gilky accomplissait un nouveau périple, le ralentissement de la Terre s’accentuait et détruisait la position d’équilibre qui la liait à son satellite. Celui-ci réagissait et tendait au contraire à conserver le statu quo et par conséquent à accélérer le mouvement pour que la Terre tourne toujours la même face vers lui.

Par suite des lois de la mécanique, cette action l’obligeait à s’approcher de la Terre, ce qui explique l’étonnement de Gilky.



CHAPITRE VIII



Au moment où la petite Comète s’approchait, pour la huitième fois, du globe terrestre, la Lune était toute proche de la Terre, à 16.565 kilomètres environ.
Mais Gilky regarda à peine notre satellite ; toute son attention était concentrée sur la Terre.


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Elle se demandait ce qu’elle allait voir maintenant, quelles scènes d’horreur et de désolation allaient la frapper, et si elle allait retrouver la présence fidèle des Nautiles.

Cependant, alors qu’elle était encore trop éloignée pour distinguer quelque chose, il lui sembla que la Lune s’allongeait et se disloquait.

C’est que l’astre des nuits terrestres venait d’atteindre un point situé à 16.562 kilomètres de la Terre. Á cet endroit elle était violemment tiraillée d’un côté par la force centrifuge, et du côté opposé par l’attraction terrestre. A cet endroit les deux forces étaient égales.

Le résultat de ces deux forces contraires produisit son éclatement.

Alors Gilky horrifiée vit un spectacle grandiose et terrifiant.

La plus grande partie de la Lune tomba sur la Terre en un choc si violent qu’il détourna la planète de sa route millénaire. Cette rencontre brutale produisit une chaleur épouvantable et les deux astres accolés poursuivirent leur route maintenant commune …

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Mais le choc produisit une telle perturbation que Gilky fut violemment projetée hors de son chemin.

Délivrée de cet assujettissement qu’elle considérait comme définitif et éternel ; mais auquel elle s’était résignée, la petite comète, ivre de liberté, de cette liberté qu’elle croyait sienne dans la candeur de sa jeunesse, de cette liberté qu’elle croyait à jamais perdue, s’élança sur une route nouvelle et inconnue, laissant la Terre poursuivre son tragique destin, se demandant à peine si de la fusion de ces deux astres morts allait jaillir un monde vivant …

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Telle fut l’extraordinaire aventure de Gilky la petite Comète.


FIN
Gaston CAMPISTROUS

 




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