- Ce qui
n’était pas si mal raisonné, on en
conviendra.
Mais
l’attention de l’éternelle curieuse
fut de nouveau attirée par un paisible spectacle. Au bord
d’un vaste étang, des
oiseaux se terraient immobiles, perchés sur leurs longues
pattes. Leur cou
flexible, leur couleur rose, leur air indifférent, leur
donnaient un charme
particulier. C’étaient des Flamants.
Le lac était situé vers le milieu
de l’hémisphère boréal, sur
un plateau qui devait devenir bien plus tard,
l’Auvergne. Les Flamants plurent beaucoup à Gilky,
tout en l’étonnant.
« La
Terre peut donc produire autre
chose que des monstres ? Comme ces oiseaux sont gracieux et
élégants,
comme ils ont l’air paisibles. Pourvu qu’un de ces
horribles montres ne les voit
pas ! Quelle hécatombe ce
serait ! »
Préoccupée
par ces idées charitables,
Gilky regarda aux alentours, dans la crainte d’apercevoir un
Atlantosaure, un
Ablosaure ou quelque autre géant redoutable.
De Reptiles,
point. Ils avaient tous
disparu brusquement à la fin du secondaire. C’est
à peine si la comète put découvrir
un petit Lézard ou un petit Serpent, minuscules et
chétifs descendants des
grands montres des temps passés.
Si
l’ère secondaire avait vu le règne des reptiles,
l’ère Tertiaire, qui occupait Gilky pour
l’instant, était le triomphe
des Mammifères. Il y en avait des milliers
d’espèces et le découragement la
saisit à nouveau devant une telle profusion, et
même confusion des faits à
observer d’autant plus qu’elle se contentait
d’enregistrer au fur et à mesure,
sans classer – qui donc le lui aurait appris ?
– les animaux en groupes
simples, ce qui aurait, en une certaine mesure, clarifié ses
observations trop
abondantes. C’est ainsi qu’elle aurait dû
distinguer les Ongulés et les
Onguiculés.
Parmi ceux
appartenant au premier groupe, Gilky
put observer d’énormes Mammifères.
C’était d‘abord un troupeau
d’Éléphants: Élephas
méridéonlis. Le plus grand, qui
semblait le
chef et qui conduisait la troupe, avait près de 5
mètres de hauteur et 6 mètres
de long ; deux défenses dépassaient de
sa
mâchoire supérieure. Beaucoup
plus loin, la petite comète vit un magnifique Mastodonte,
énorme éléphant, mais
qui différait du précédent en ce
qu’il portait quatre défenses deux à la
mâchoire supérieure, deux à la
mâchoire inférieure.
Enfin, au
cours de la rotation de la terre
qui présentait successivement à Gilky toute la
surface du globe, notre curieuse
aperçut une autre espèce
d’éléphant, le plus énorme
qu’il fut donné d
contempler : un Dinothérium,
haut de plus de 5 mètres, porteur de
deux défenses seulement, mais à la
différence de l’Élephos, appartenant
à la
mâchoire inférieure et recourbée vers
le bas.
Il y avait encore bien d’autres animaux
intéressants dans cette catégorie, mais justement
il y en avait trop pour Gilky,
elle ne pouvait pas les observer tous.
C’est
à peine si elle remarqua
l’Hipparion
qui, par lentes transformations conduira au cheval, et un
Titanothérium,
gros Rhinocéros à peau épaisse, vivant
près des marais et des cours d’eau,
possédant deux cornes sur le nez, un poitrail
développé et une courte queue.
Par contre, elle s’attarda à contempler un gracieux
ruminant : le Xiphodon,
dont la légèreté et la
vivacité la reposèrent des lourdes formes des
éléphants.